La fois où j’ai breakup avec un émoji

lapins

Avant de vivre la malédiction-bénédiction du célibat prolongé, il y a certaines choses que je tenais pour acquises. La liste est plutôt longue : les gens dont le visage sent toujours bon, les orgasmes simultanés, les soupers aux chandelles, les câlins avant de s’endormir, le sexe qui veut dire quelque chose, les réponses aux messages textes (surtout quand elles ne prennent pas 3 jours à arriver), les gars qui n’ont pas peur de tomber en amour, ceux qui suppriment les applications de rencontre de leur téléphone quand ça devient sérieux, et ainsi de suite. Je n’appréciais pas ces choses-là à leur juste valeur, et c’est maintenant que je m’en rends compte. Pourtant, je pense que la dernière année a été une des plus belles de ma vie. Je m’avance de plus en plus vers mes rêves, j’en vois le contour se dessiner. Je peux presque en toucher certains. Niveau carrière, étude, passions : je suis comblée. C’est drôle parce que j’avais l’impression qu’en réglant toute cette sphère-là de ma vie, le reste viendrait peut-être tout seul, mais non.

Ça ne vient pas tout seul. Ça ne vient pas tout court, on dirait. J’en suis rendue à un certain point crucial de mon célibat : celui où j’ai foutument peur de tout. Vient un temps où on voit la liste des échecs amoureux (et autres niaiseries) s’allonger et on se dit : ouain, je devrais-tu me calmer ?

Vient un temps où on est tannée que nos histoires de cœur ne marchent pas, tannée d’écrire là-dessus. On a envie de se trouver quelqu’un pour de bon. Une personne qui nous aimerait pis qui nous abrillerait de ses bras pendant les mois frigorifiques de l’hiver. Mais à la place, on gagne un concours d’écriture organisé par Radio-Canada, on raconte notre expérience à la radio, aux journaux, sur Facebook. On regarde le compteur de likes monter, mais ça ne change rien, puisque celui qui compte le plus n’y est pas.

Et encore une fois de plus, celui qui était censé nous protéger du monde extérieur nous déçoit. Ce n’est même pas la première fois. Et parmi les entrevues et les apparitions publiques, on réalise que cette personne ne prend même pas la peine d’essayer de nous voir. Pas même de nous féliciter.

Je dis « on », mais dans le fond c’est probablement arrivé juste à moi (peut-être à Taylor Swift aussi, j’aime bien penser qu’on vit les mêmes choses). Il y a toi qui ne te pointes pas et qui assumes que je serai libre quand tu auras envie d’une distraction nocturne, mais je ne suis plus à ta disposition. J’ai autre chose à faire, maintenant. Trop occupée, alors notre semi-relation bat de l’aile encore plus qu’avant. Et quand tu me demandes pour la troisième fois de remettre au lendemain, je repense à ce que tu avais à dire sur les relations polyamoureuses, je repense à toutes ces filles dans ton téléphone, et je me sens comme un deuxième choix. Un troisième ou quatrième, même.

Qu’est-ce qu’on dit à un gars quand on a figured out qu’il se crisse totalement de nous ?

J’ai exprimé mes émotions de la seule façon qui me semblait logique par message texte : un émoji.

Celui-là : capture-decran-2016-10-08-15-10-14

Depuis le fameux incident de l’émoji, plus de nouvelles.

Alors je me retrouve toute seule, sans même avoir eu droit à une fin normale ou correcte. C’est peut-être la seule fin dont j’avais besoin. Digne de cette relation atroce. Une certaine culpabilité s’installe, je méritais peut-être mieux que ça. Mieux que ce total manque d’explications. Mais j’ai l’impression que rien de ce que tu as à dire ne pourrait valoir la peine. Les histoires de gars trop libres, je les ai toutes déjà entendues.

Alors voilà, ça ne s’est pas si bien passé que ça finalement.

À ma liste d’échec, je peux ajouter ton nom.

À ma liste de phobies se rajoute celle des gars qui « ne sont pas faits pour la monogamie ».

Ma liste était déjà assez longue.

Je suppose que je vais être obligée de suivre les récents conseils de mes amies. Je vais me concentrer sur mes projets, mes passions, sur l’écriture. Au lieu de dire « J’ai gagné le concours du récit Radio-Canada, tu m’aimes-tu maintenant ? », je vais dire « j’ai gagné le concours du récit Radio-Canada, écrire c’est ma passion, j’ai besoin juste de ça ».

Écrire, oui. Mais plus pour toi.